Durée : 10 jours
Distance : 370 km
Dénivelé + 3 775 m
Dénivelé – 3 581 m
Region : Désert d’Atacama – Chili
Point de départ : Calama – Chili
San Pedro de Atacama est un petit village coincé entre l’un des déserts les plus arides de la planète et une chaîne de volcans dont beaucoup culminent à plus de 6 000m. La région regorge de canyons ocres, plateaux de sel et autres curiosités géologiques. Malgré tout ça on n’avait initialement pas prévu de s’y arrêter si longtemps…
Fraîchement débarqués à Calama avec nos deux petits bolides et la remorque, on était très excités par cette nouvelle aventure. On avait hâte de faire chauffer la gomme de nos pneus sur l’altiplano Bolivien que l’on était supposés rejoindre en quelques jours en passant par San Pedro de Atacama et le col Hitocajon.
Faire des plans c’est bien mais quand la météo en décide autrement, il n’y a plus qu’à s’y plier. On cherche encore celui qui a dit “ tout vient à point à qui sait attendre” , mais visiblement il n’a jamais eu affaire à la Pachamama bolivienne.
Time-Lapse
Itinéraire complet
Calama - San Pedro de Atacama
Distance : 118 km
Dénivelé + 1 611 m
Dénivelé – 1 416 m
Après avoir bouclé toutes les affaires, graissé les chaînes et serré les derniers boulons, on se met en route direction San Pedro De Atacama. C’est un peu nouveau pour nous de devoir pédaler plutôt que de mettre un pied devant l’autre, mais malgré la chaleur on part avec le vent dans le dos sur du plat donc pour l’instant tout va bien…
Une centaine de kilomètres et un col séparent Calama de San Pedro. Comme à notre habitude on est plutôt lents donc on sait qu’il va nous falloir plus d’une journée, surtout en comptant les 12 jours de nourriture et les deux jours d’eau qu’on traîne avec nous.
Après quelques heures à pédaler on se trouve un spot où mettre la tente dans la montée vers le col. Défaire et refaire les sacs va nous prendre plus de temps que d’habitude avec tout notre nouvel attirail.
La fin de la montée qu’on avait mis de côté la veille se fait sentir dans les cuisses. Derrière, une belle descente nous attend. On laisse rouler, ça fait du bien. On est un peu limité en vitesse : la remorque tangue de manière inquiétante dès qu’on va trop vite.
On casse la croute avec la vue sur le Nord du désert d’Atacama, la vallée de la Lune et les volcans qui marquent la frontière avec la Bolivie. On remballe tout et c’est reparti pour quelques kilomètres sans efforts, en descente avec le vent de dos. Sur les cartes on avait repéré une piste quitant la route principale pour rejoindre la vallée de la Lune par le Nord. On essaie.
Première piste de terre (il y en aura BEAUCOUP d’autres) et on commence à se dire que la carriole c’était pas forcément une idée de génie…
On arrive devant un petit col qui marque probablement l’entrée Nord de cette vallée. On s’y engouffre avec beaucoup de mal. Le vent y pénètre avec une force assez phénoménale. On a beau l’avoir dans le dos, on poussera les vélos sur certaines portions, à défaut de pouvoir rester dessus. Par moment on essaie de se mettre en selle mais on se fait vite coucher par une bourrasque plus joueuse que les autres. Une fois passé l’entrée, une belle montée nous attend. Cette fois le vent est presque dans le bon sens. Tant mieux car le terrain n’est pas facile . On roule pour la première fois sur une belle croute de sel. Pas forcément aussi pratique que ça en a l’air.
On arrive une petite heure avant le coucher de soleil. Après avoir exploré le Nord de la vallée il nous faut trouver un spot pour passer la nuit avant qu’il fasse noir. On se trouve un coin plat au fond d’une vallée et bien à l’abri du vent. L’endroit est incroyable. On se croirait effectivement sur une autre planète. La vallée est faite de dunes de sable et de roche ocre, le tout soupoudré de sel. On s’endormira dans cet endroit magique sous un plafond d’étoiles fidèle à la réputation de la région.
Réveil avec le soleil, et bien qu’on ne soit pas encore sur l’altiplano il ne fait pas si chaud. On plie toutes les affaires en vitesse et on décide d’aller prendre notre petit déjeuner sur une des dunes au soleil. De là haut la vue sur la vallée est exceptionnelle, le gradient de température aussi. On rencontre d’autres cyclistes qui nous conseillent d’aller explorer les grottes de sel. Après quelques heures on se remet en route.
Quelques centaines de mètres plus loin, on attache nos vélos en face de l’entrée des grottes. Il s’agit d’un canyon creusé par un ruisseau qui est maintenant accessible à sec. Parfois c’est tellement étroit qu’on a du mal à y passer les fesses, c’est plutôt ludique, surtout qu’il y a quelques passages dans le noir total où il faut tatoner pour trouver son chemin quand on a oublié la frontale.
Une fois sorti de la partie la plus étroite (et touristique) il est possible de remonter quelques centaines de mètres dans un canyon plus large et plus profond. Moins balisé que les grottes, le lieu est plus propice à l’exploration. Après y être restés encore quelques heures on se remet en route cette fois pour San Pedro De Atacama.
Vallée Catarpe
Distance : 30 km
Dénivelé + 324 m
Dénivelé – 324 m
Après avoir passé une bonne nuit dans un lit d’une auberge du centre ville, on se met en route gonflés à bloc pour les 2000m de dénivelé qui nous attendent pour rejoindre la Bolivie. Le plan est de passer la frontière Chili/Bolivie par le col Hitocajon, traverser le sud Lipez avec ses lagunas Verde et Colorada, puis le Salar d’Uyuni pour finir à La Paz. Passage obligatoire avant la montée qui mène à la frontière : le bureau d’immigration de sortie du Chili.
« No va a ser possible » ; on nous apprend que le col est fermé pour plusieurs jours car bloqué par la neige et on apprend par la même occasion qu’il est impossible de négocier avec un « carabinero de Chile« .
La frontière est fermée, personne ne passe. Apparemment il y aurait neigé plus d’un mètre côté bolivien. On se trouve un itinéraire de quelques jours histoire de laisser passer la neige et de se faire un peu les jambes.
C’est parti pour une petite boucle de deux jours de vélo (facilement faisable à la journée depuis San Pedro) dans un endroit qui vaudra finalement vraiment le détour : la vallée Catarpe.
Après deux passages à gué (heureusement, on a laissé la carriole en ville) on rencontre une chienne, seule gardienne de l’entrée du Canyon Del Diablo. Visiblement amicale, elle nous adopte et continue la route avec nous.
On s’aventure dans cette gorge à vélo en se demandant jusqu’où on va bien pouvoir continuer. Il faut s’imaginer un canyon entre 20 et 30 mètres de profondeur avec un fond plat large d’à peine quelques mètres. L’endroit est incroyable. Ses successions de virages de quelques mètres de large bordés de murs de couleur ocre en font un lieu paradisiaque pour s’amuser en vélo.
Le canyon débouche ensuite sur une zone plus ouverte avec des petites collines ocres drapées et saupoudrées de sel. La chienne est toujours là, installée à côté de nous. Un peu coupable de manger devant elle, on lui donne un morceau de notre fougasse et la fait boire. Autant tout à l’heure c’était verdoyant, autant dire qu’ici on a l’impression d’être dans un four. On repart. La ballade dans les gorges n’est pas terminé. On arrive dans un second espace ouvert. Toujours aussi incroyable.
Il n’est pas très tard, donc on décide d’aller s’aventurer un peu plus au fond de la vallée. Il est possible de rejoindre la piste après le canyon, la jonction se situe au niveau d’une petite chapelle (il n’y en a pas des centaines…). On remonte un peu la rivière pour explorer davantage. On croise un berger de lamas, les premiers que l’on voit. On continue et on se heurte à un autre passage à gué. Ca à l’air assez profond : on abandonne et on retourne dans notre vallée en testant une autre sente. Ça passe bien dans l’ensemble mais la descente dans la vallée est assez technique. On échappe au soleil de justesse…
On plante ensuite la tente au milieu de cet espace ouvert entouré de petites collines ocres joliment drapées . On partagera le repas avec notre guide improvisé qui ne nous aura pas quitté de la journée. Elle gobbe volontiers les premières portions et enterrera la dernière dans le sable pour plus tard, en cas de coup dur. Le soleil se couche et les températures baissent. On lui installe nos affaires dans l’abside pour qu’elle y soit à l’abri. Après avoir bataillé avec elle pour qu’elle ne s’installe pas sur nos matelas, elle passera la nuit dans la tente avec nous.
Le lendemain on partagera également le porridge. On plie tout et on reprend la direction de la ville. À l’approche de l’entrée, elle nous abandonne pour un autre couple de cyclistes, on se sent un peu trahis mais on s’en remettra.
Deuxième passage au poste d’immigration, « No va a ser possible » Un des carabineros nous conseille d’aller jusqu’à la Laguna Miscanti en attendant que la frontière ouvre.
Comme on ne remet pas en question un conseil d’un carabinero, en route pour la Laguna Miscanti.
Laguna Miscanti
Distance : 202 km
Dénivelé + 1 470 m
Dénivelé – 1 470 m
On part le matin tôt. Il y a une bonne centaine de kilomètres et environ 2 000m de dénivelé qui nous séparent de la Laguna, notre objectif. Les premiers kilomètres sont longs, la route est rectiligne mais le paysage est incroyable. Les volcans de l’altiplano accumulent les nuages qui deviennent de plus en plus noirs au fur et à mesure de la journée. Un bon vent de dos nous aide encore pas mal, en espérant que ça se calme pour le retour…
Après avoir pédalé une petite soixantaine de kilomètres on se trouve une petite crevasse plane pour passer la nuit, cachés du bruit des voitures et du vent. Le paysage est devenu carrément apocalyptique. Le ciel semble irréel et le vent balaie la poussière et le sable sur plusieurs centaines de mètres de haut.
Le lendemain, le ciel n’a pas dénoirci et le vent n’a pas vraiment faibli. L’étape est plus physique. Ce sera notre première grosse côte. On se rend compte que marcher et pédaler c’est franchement pas la même histoire. Il faut qu’on s’habitue.
Pour se remettre de cet effort on s’offre une petite bière sur la place du village de Socaire avant de continuer. À la sortie du village un gros panneau indique que l’accès à la Laguna est fermé pour cause de.. neige ! Décidément on est encerclé. Tant pis, la course s’arrête là. On se remet en route pour descendre en quelques minutes ce qui nous a demandé plusieurs heures de montée.
On avait repéré à l’aller un autre spot de bivouac. Le coucher de soleil sera exceptionnel. Le temps d’une petite dizaine de minutes tout le désert se colore d’une teinte rose/orange d’une puissance qu’on avait encore jamais vu (et qu’on a pas revu depuis). Le plafond nuageux au dessus de nos têtes diffuse cette lumière comme un abat-jour. L’ambiance est incroyable.
Après une bonne nuit un peu fraîche, on remballe les affaires. Sur les cartes, il y aurait une piste juste après le village de Toconao qui coupe à travers le désert d’Atacama pour rejoindre directement la Laguna Cejar. On s’aventure sur la piste qui devient de plus en plus étroite, quasi impossible à passer avec la carriole. Après quelques pénibles centaines de mètres la piste meurt pour de bon, demi-tour obligatoire.
Après avoir fait tout le sentier en sens inverse avec un petit passage de forêt d’acacia, on compte les trous dans nos pneus neufs. En comptant la carriole, 28 rustines posées en a peine plus d’une heure : admirez la double performance ! Plus au nord, on rattrape finalement la piste officielle. Ça roule plutôt pas mal. Arrivant à la Laguna Cejar, on nous demande 15000 pesos chacun (20€) pour pouvoir y accéder de plus près. Ce lac attire beaucoup de touristes pour sa haute concentration de sel.
On peut y flotter comme un bouchon de liège pour peu qu’on ferme les yeux sur sa concentration d’arsenic anormalement haute, que beaucoup semblent ignorer. Vu le prix demandé à l’entrée (l’équivalent d’une semaine d’approvisionnement en nourriture), on passera discrètement de l’autre côté du lac pour y voir quelques jolis reflets avant de se remettre en route pour San Pedro.
Là encore les paysages sont sublimes. Acacias et herbes jaunes viennent colorer le paysages sous un soleil couchant. Dans ce sens il nous faudra beaucoup plus de temps pour rejoindre San Pedro de Atacama. Le vent est de plus en plus fort et cette fois ci de face. Tard dans la soirée, on profite pour repasser devant le bureau de l’immigration espérant que demain on puisse hisser les voiles.
No va a ser possible…
Vallée de la mort
Distance : 19.4 km
Dénivelé + 369 m
Dénivelé – 369 m
On se réorganise, on cherche encore quelques itinéraires à vélo dans les parages pour les jours qui viennent. On ne voudrait absolument pas rater le coche pour passer le col et ni perdre trop de temps au même endroit. Même les habitants sont surpris de cette fermeture. Certains n’avaient pas vu le col fermé depuis 20 ans. On a visiblement pas choisi la bonne année.
En route pour la vallée de la Mort.
L’entrée de la vallée se situe dans un virage de la route quelques centaines de mètres au Nord de San Pedro. Le début ressemble beaucoup à la vallée de la Lune, mais le sel laisse ensuite place à d’énormes dunes de sable. Après quelques virages, on arrive au pied d’une petite côte dans laquelle on s’enfonce dans le sable sur une bonne dizaine de centimètres. Inutile de préciser qu’on ne restera pas en selle…
On pousse.
Arrivés au col, on quitte la piste pour rejoindre une sente sur le plateau qui longe le bord des falaises. On n’est pas déçus. La falaise que l’on longe plonge directement dans les dunes de sable. De là la vue est très dégagée sur la vallée de la £ort, la vallée Catarpe et le fameux col Hitocajon qui nous nargue et nous retient ici. En effet, d’ici il paraît déjà beaucoup plus blanc.
On se trouve un pare vent de pierre qu’on consolide avant de se faire un repas les pieds dans le vide. Le soir on aperçoit quelques lumières qui descendent du col. Ça y est, il est enfin ouvert !!
Le lendemain on continuera de longer les falaises direction Nord pour rejoindre dans la vallée Catarpe par un tunnel. Il s’agit d’un boyau creusé directement dans la roche qui permet de réaliser cette boucle (frontales nécessaires).
Une fois de l’autre côté on entame les lacets de la descente. On se fait plaisir. Arrivés en bas c’est un tout autre paysage. Beaucoup plus verdoyant, une rivière ocre longe la falaise et nous indique la direction du village.
A notre retour en ville, « No va a ser possible, está cerrado. » on apprend que le col est toujours bloqué et que ça risque de durer encore une bonne semaine. Les lumières qu’on avait vu la veille étaient celles d’un convoi de camions qui avaient été coincés là haut et descendaient sous escorte militaire. Cette fois ci il faut se rendre à l’évidence, on doit trouver une autre alternative.
La météo aura eu raison de nous, on décide de contourner le problème en mettant les vélos dans la soute d’un bus avec toutes nos affaires direction Uyuni par le col Ollague, plus au Nord. A ce moment là on a encore espoir que le col ouvre d’ici 2 à 3 semaines pour qu’on fasse le trajet dans le sens inverse: Uyuni – San Pedro
Pas si sûr…
On a quand même eu beaucoup de chance dans cette histoire, le nord du desert d’Atacama est un endroit fantastique à explorer à vélo. D’ailleurs si vous vous trouvez dans les parages vous pourrez trouver des loueurs de vélo dans le village… On recommande chaudement !
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