Durée : 13 jours
Distance : 175 km
Point de départ : Coron village, Busuanga, Philippines
Coordonnées du point de départ : 11.99488°N, 120.20381°E
Situé entre les îles de Palawan et Mindoro, l’archipel des Calamianes est un petit groupement d’îles qui regorge de trésors naturels. Si l’île de Coron est celle qui attire le plus de visiteurs, l’ensemble de l’archipel détient de multiples pépites parfois encore inconnues.
La première chose qui frappe avant même d’atterrir sont les fonds marins. Visibles depuis l’avion, des tapis de coraux encerclent les îles et de nombreuses épaves gisent à faible profondeur, le tout sous l’œil attentif de mille milliards de petits poissons bariolés. Après trois jours à explorer les fonds marins en plongée bouteille, on se met à la recherche d’une embarcation pour partir explorer les îles. Ce n’est pas chose facile. Les agences d’activité de Coron ne proposent pas de location de kayak sans guide, pour cela il faut aller au marché du port de plaisance. Peu convaincu par les petits kayaks qu’on trouve, on continue d’arpenter les ruelles jusqu’à finalement trouver notre bonheur : un grand Kayak 3 places, rempli de détritus en tout genre mais en très bon état. C’est d’ailleurs plus un Kayak de piscine qu’autre chose. Il est peu épais, le fond est assez plat, pas de rangements à l’intérieur du kayak, encore moins de gouvernail, mais c’est ce qui se fait de mieux sur l’île. On finit par trouver le propriétaire du navire, tomber d’accord sur le prix et le réserver pour le départ.
Video
Itinéraire complet
Coron - Guintungawan
Distance : 38.6 km
Durée : 3 jours
On lève l’ancre plus tard que prévu. Le temps de faire les courses, trouver des sacs étanches, tout emballer, la moitié de la journée s’est déjà écoulée et le vent s’est bien levé. Du coup on demande un petit coup de pouce à notre loueur en mettant le kayak sur un de leur bateau traditionnel “Bangka” pour les 4 kilomètres qui séparent la ville de Coron avec l’île du même nom. L’aventure commence donc par un pique nique sur la plage de Calachuchi avant de se lancer à la découverte de la partie Nord de l’île. L’endroit est incroyable.
La journée a déjà bien avancé, il nous faut trouver un endroit pour passer la nuit. On a repéré sur les images satellite une petite plage à peine quelques kilomètres à l’Ouest de notre point de départ. Une famille y habite. Ils nous autorisent à y passer la nuit moyennant 150 pesos (2,5€) par tête. Pendant la nuit, (une fois de plus) on se fera un peu chahuter par la marée. Cette fois ci pas besoin de déménager mais les vagues à quelques centimètres de la tente enlèvent un peu à la sérénité de la nuit.
On est à quelques coups de pagaie du lac Barracuda, l’un des sites les plus visités de l’île avec le lac Kayangan. Ils font tous deux partis d’une enfilade de lacs sacrés pour les indigènes qui occupent l’île. On décide de se lever tôt pour arriver avant les foules. Débarquement sur les lieux aux alentours de 6h. Le soleil est encore bas, derrière les falaises, mais quelques locaux sont déjà là. Depuis moins d’un mois, la nouvelle réglementation du site interdit l’accès à ceux qui ne font pas partie d’un tour organisé, ou à défaut qui n’ont pas acheté leur ticket d’entrée individuelle au centre ville de Coron, sur l’île d’en face. On tombe sur un mec sympa qui nous laisse passer en douce.
Le lac se dévoile derrière une petite ligne de drapé calcaire. A cette heure là il n’y a encore personne pour troubler le reflet sur le lac. Il paraîtrait que le fond du lac est chaud, une dizaine de degrés de plus qu’à la surface. Ça vaut vraiment le coup d’aller vérifier par soi-même, c’est très surprenant.
Une eau douce d’environ 28°C stagne sur les 5 premiers mètres de profondeur, l’effet commence à se faire sentir à partir de 6-7 mètres, puis ensuite l’eau prend deux trois degrés par mètre gagné, jusqu’à une température de 40°C au fond, mais nos petits poumons de bipède terrestre ne nous permettent pas de descendre en dessous d’une petite dizaine de mètres, où l’eau est déjà TRÈS chaude.
Le soleil commence a toucher le lac quelques instant avant l’arrivée des premiers visiteurs. On retourne a notre kayak, direction le Sud de l’île en longeant par la côte Ouest, beaucoup plus abrité du vent dominant : le “Habagat”.
Sur le trajet, difficile de ne pas s’arrêter tous les deux cents mètres. Une enfilade de falaises calcaires, lagons bleus et récifs de coraux multicolores incitent à prendre quelques pauses. C’est magique.
La différence de fréquentation d’un lagon à l’autre est frappante. Tous les tours opérateurs se concentrent principalement sur 3 spots: Kanagyan Lake, Barracuda lake et Twin Lagoon, où les bateaux sont collés les un aux autres en milieu de journée, mais le reste est presque désert, et tout aussi beau.
Les bateaux de touristes ne viennent pas jusque-là, et ca fait quelques kilomètres déjà que l’on cherche des habitations pour se ravitailler en eau.
L’accueil sera au-delà de nos espérances. Une fois passée les deux cabanes au bord du rivage, on croise une habitante qui nous fait signe de venir nous poser sur la plage. On s’exécute.
Une fois passé la pointe Nord-Ouest de l’île, le paysage change. Exit les drapés creusés, cavités, et lacs. Ici une grande falaise s’élève tout le long de la façade Ouest. Différent, mais toujours impressionnant.
La redescente jusqu’au Sud nous prendra une journée et demie, avec une belle rencontre : la tribue Katoutobo, une 15aine de personnes qui vivent sur un petit bout de plage, au milieu de la côte Ouest de l’île de Coron.
On commence à « discuter » sans aucun vocabulaire en commun. On lui demande si on peut acheter de l’eau, et si possible du riz cuit, ce à quoi elle répond par un signe nous invitant à venir. Contre toute attente, une 12aines d’enfants, ados, adultes et grands-parents sont installés ensemble, certains jouent aux cartes, d’autres entretiennent le feu, tout le monde est plus ou moins actif, plus ou moins pensif, le tout dans une atmosphère bienveillante.
On se fait assoir un peu au centre de tout ce petit monde qui semble heureux de partager un bout de quotidien avec nous. On aura le droit à quelques litres d’eau douce, une gamelle pleine de riz et des petits mollusques cuits à la vapeur. En prime, une démonstration de danse, réalisée par Athonas (5 ans) avec l’assurance d’une rock-star. On quitte l’endroit à contre cœur, quelques heures plus tard. Le vent a commencé à se lever, nous obligeant à revoir les objectifs à la baisse et à se poser sur une petite plage au pied des falaises.
Après une petite sieste et une tentative de pêche infructueuse (première d’une longue série) le vent semble se calmer un peu. On en profite pour ramer jusqu’au coucher du soleil, pour continuer d’avancer en direction du Sud. Le plan était de poser le camp au plus près de la pointe Sud pour se lancer dans la traversée tôt le lendemain, avant l’arrivée du vent.
On plie le camp très tôt, mais le vent est encore -ou déjà- là. On finit les quelques kilomètres qui nous séparent du point de traversée. Vu l’intensité du vent, et malgré la protection que nous offrent les falaises, la seule possibilité est de descendre plus au Sud pour avoir ensuite le vent dans le dos pour la traversée en mer ouverte. Après une petite séance de gros doutes sur la faisabilité du projet, on finit par se lancer, en se disant que le vent dans le dos devrait dans tous les cas nous pousser vers l’île de Guintungawan. Au début ça ne se présente pas trop mal, le vent nous pousse effectivement bien vers l’Ouest, tout se passe bien.
Au fur et à mesure qu’on s’éloigne de l’île de Coron, le vent se fait de plus en plus fort, c’est de plus en plus compliqué de gérer le cap, mais surtout la houle semble se creuser un peu plus à chaque coup de pagaie. La deuxième partie sera franchement sportive, surement un peu ridicule aussi. Deux marins d’eau douce, dans des creux de deux mètres, sur un Kayak de piscine, la scène a de quoi inquiéter ou faire rire, suivant le côté où on se place.
Nous, on est au max. On force comme des bœufs pour essayer de rester perpendiculaire aux vagues. On se fait secouer dans tous les sens, le nez du kayak s’enfonce dans les vagues, et on frôlera de très (très) prés le naufrage, à deux reprises. Dans le pire des cas, on a des gilets de sauvetage et on peut se laisser pousser vers l’île suivante, mais on est pas sûrs que la petite ficelle qui entoure les sacs permettrait de garder l’ensemble du matos et des vivres avec nous. Entre deux creux on arrive à deviner l’île qui se rapproche lentement, trop lentement.
Plus on se rapproche, plus les creux se creusent, et on s’inquiète de l’entrée sur le lagon. Si les vagues de deux mètres se transforment en rouleaux, on n’est pas près d’arriver entier… On n’a pas vraiment le choix, il faut qu’on l’on accoste ou que l’on s’échoue sur cette île, la suivante est trop loin et bordée de petites falaises.
On est exténués, mais une douce euphorie s’empare de l’équipage après la castagne. Une chose est sûre, le kayak c’est fini pour aujourd’hui.
Il est 11h. Après une courte exploration des lieux, on s’échoue sur le bout de plage avant de s’embarquer dans une sieste qui durera une grande partie de la journée.
Finalement, la marée est assez haute pour éviter le pire scénario. L’entrée dans le lagon reste sportive, il faut slalomer entre les blocs de coraux affleurant poussés par les vagues, mais ca passe…
Une fois á l’intérieur du lagon, on est enfin protégés du chaos environnant. L’île devant nous doit faire une petite cinquantaine de mètres de diamètre. Il y a une maison, pour l’instant déserte.
Au réveil de la sieste, on est encore seuls sur l’île. Le vent n’a pas faibli, la houle non plus. Il reste encore une bonne traversée sur une portion ouverte, sauf que cette fois ci, la houle et le vent poussent vers des falaises à quelques kilomètres, sur lesquelles on voit des vagues s’éclater d’ici. On ne bougera pas plus aujourd’hui. Au coucher de soleil, une fois le camp installé, un petit bateau à moteur se dirige droit sur l’île. Retour du proprio. Finalement c’est une famille de 5 qui sort de cette coque de noix à peine plus longue que notre kayak. On leur demande si on peut passer la nuit ici (devant la tente montée…) Visiblement pas de problème.
Guintungawan - Maltatayoc
Distance : 64 km
Le lendemain matin on fera l’objet de la curiosité des deux aînés, entre 5 et 10 ans. Ils sont descendus de la maison pour inspecter le camp. Curieux mais pas téméraires, ils gardent leurs distances avant l’arrivée de leur mère.
Niveau vent, ce n’est pas franchement mieux que la veille. Pareil pour la houle. On demande au capitaine du mini navire s’il peut nous déposer sur l’île voisine. Il nous propose un prix qu’on accepte sans hésiter et il nous embarque, le Kayak avec.
Malgré le moteur et les deux flotteurs, ça tangue encore pas mal. Lui aussi a l’air assez tendu. Sur les plus gros creux, il éteint son moteur après le sommet de la vague pour glisser de l’autre côté sans risquer de planter l’avant du bateau. On se sent quand même petit mais c’est moins pire que sur le kayak… Une fois passé derrière les falaises qui brisent la houle, la mer est beaucoup plus calme. Arrivés en face de l’île de Bulalacao, on lui fait signe de nous déposer sur un bout de plage.
On se remet à l’eau pour aller s’enfoncer dans la mangrove qui occupe une grande partie de l’espace entre les îles de Bulalacao et Dialolug.
L’eau est d’un calme parfait. On entend quelques chants d’oiseaux et le bruit des pagaies dans l’eau, rien d’autre. Ça fait vraiment du bien.
Plus besoin de se battre pour avancer, ça glisse presque tout seul. De l’autre côté, la mangrove s’ouvre sur un espace protégé entre deux petites îles. Plus on avance au Nord, plus l’espace entre les îles augmente et plus le vent s’engouffre. Ça souffle au 3/4 de dos, donc ça aide un peu mais de nouveau, il faut continuellement redresser le cap.
On a repéré sur les cartes un petit complexe hôtelier au Nord de l’île de Bulalacao. Ça risque de trancher avec le style de ce qu’on a visité jusque-là, mais on prévoit d’y faire une petite pause pour s’offrir un resto. De toutes façons il ne nous reste presque plus d’eau, donc il faut s’arrêter.
En s’approchant du rivage, un garde du complexe nous fait signe de faire demi-tour et de ne pas accoster. Un peu surpris par l’accueil, on se rapproche. Il gesticule de plus en plus vite. Arrivés à une dizaine de mètres, on lui explique qu’on voudrait s’offrir un repas chez eux. Il ne veut rien savoir et nous perçoit comme des envahisseurs. Sans plus d’explications il nous demande de déguerpir. On lui explique gentiment qu’on a simplement plus d’eau et qu’on ne bougera pas de là. Il gesticule toujours autant et commence a hausser le ton. Forcé de constater qu’il n’arrivera pas à nous faire partir, il appelle du renfort au Talkie.
Ses collègues sont beaucoup moins agressifs, on repart de l’île 5 minutes après avec 4 litres d’eau potable. On apprendra par la suite qu’un milliardaire venu avec son son yacht avait privatisé toute l’île… ou comment l’argent pourrit notre planète.
Le ventre est toujours vide et visiblement il faut trouver une autre terre d’accueil pour poser nos sacs.
Au Nord de Bulalacao, deux petites îles bordées de sable fin nous font vite oublier cette mauvaise rencontre.
Cap sur la petite île de Malcapuya, quelques kilomètres plus à l’Ouest. Une grande plage de sable blanc bordée de palmiers occupe le Sud de l’île. Juste en face, un lagon turquoise incite à traîner un peu dans les parages. On casse la croûte : un mini bout de pain chacun histoire de tromper la faim.
Finalement on est pas mal…
Finalement pas de plage de sable, mais une petite zone de rochers nous permettra quand même de nous y installer pour la nuit, seuls au monde. C’est ici qu’on fera la première rencontre avec le photoplancton : un genre de micro-luciole aquatique qui s’illumine dès qu’on la bouscule. Tous nos mouvements sous l’eau sont accompagnés d’une myriade d’étoiles éphémères. Du coup on restera un bon moment à gesticuler dans l’eau, comme des gamins avec un nouveau jouet. Le spectacle est incroyable.
En repartant, on contourne l’île par l’Ouest pour s’abriter du vent. On utilisera ce qu’il nous reste de l’après-midi pour continuer à remonter au Nord, en longeant les îles de Tampel et Tambon. La journée aura été longue, et ça commence à se faire sentir dans les bras, mais on arrive bientôt à l’endroit que l’on visait pour passer la nuit : une île d’environ 50 m² qui trône au milieu d’un récif beaucoup plus grand. Les images satellites montrent une petite tache blanche à l’Ouest de l’île. On espère y trouver une petite plage pour planter la tente.
Le lendemain on file en direction de Culion: la deuxième (et dernière) ville de l’archipel. Beaucoup plus petite que la ville de Coron, Culion est beaucoup plus authentique et bucolique. Il ne nous reste plus d’eau, plus de bouffe. Il est grand temps de se payer un ravitos. La location du kayak, le bateau taxi et les quelques entrées qu’il a fallu payer ont eu raison de notre petite réserve de cash. On débarque comme des fleurs, directement au pied d’un restaurant sur pilotis : le Safari Lodge. Les ventres sont vides depuis déjà quelques kilomètres…
Finalement ce ne sera pas si simple que prévu. Aucun établissement n’accepte la carte bancaire, et il n’y a aucun moyen de retirer de l’argent sur l’île. Le seul établissement d’où il est possible de sortir du liquide est une sorte de Western Union Local. On ne connaît qu’une personne aux Philippines à qui demander de nous envoyer de l’argent, Gerlie : la personne à qui on a loué le Kayak. Après une longue négociation on réussit à se faire envoyer 1000 pesos (15 euros) qui nous serviront à acheter de la nourriture pour une semaine.
La gestionnaire du restaurant Safari Lodge ayant suivi de loin notre histoire, elle nous propose de nous offrir le repas. On accepte sans rechigner.
Une fois les ventres et les sacs de provision pleins, on finit par partir pour traverser ensuite le bras de mer qui nous sépare de la presqu’île au Nord de Culion pour aller y passer la nuit.
On traverse la mangrove de Paluat qui permet de couper au plus court. Après un bon kilomètre de boyaux, la mangrove s’ouvre sur l’autre côté de l’île. Le vent est de plus en plus fort. Bien qu’il soit aux trois quarts de dos, il nous en fait voir de toutes les couleurs. Il tend à faire tourner le kayak, il faut constamment se battre pour garder le cap, c’est épuisant. On arrive en début d’après-midi sur Pass Island, bien contents de trouver un bout de plage pour se poser. En revanche, ce n’est pas la petite île isolée qu’on s’attendait à trouver après une semaine de kayak. Ça fera l’affaire pour casser la croûte, mais pas assez calme et sauvage pour y passer la nuit.
Le lendemain on remet le cap vers le Nord-Ouest. Le vent d’Est est toujours là. Pour l’instant ce n’est pas vraiment un problème, mais on espère que ça va se calmer avant le retour sur Coron. De nouveau, on se faufile entre les îles, relativement à l’abri du vent. On se posera sur une petite plage d’une île habitée pour reprendre des forces. On ne tarde pas à se faire inviter par les occupants à boire du Brandy pour le petit dej. Après une conversation quelque peu limitée mais sourire aux lèvres, on repart.
Nous sommes les seuls visiteurs de l’île. JR occupe les lieux, avec un chat et deux chiens. C’est le seul habitant de l’île, il y vit seul depuis 6 mois. Il a 24 ans. Il nous regarde débarquer de notre kayak, intrigué et amusé, puis nous accorde la permission de s’installer sans rien demander en contrepartie. Une fois la nuit tombée on partagera notre Rhum et le repas avec lui. Un bon moment, hors du temps.
Sur les images satellites, l’île de Maltatayoc paraît prometteuse. On avale les 8 kilomètres restants plus rapidement que prévu et on ne sera pas déçus d’avoir poussé jusque-là. L’île fait entre 10 et 40 mètres de large, pour près de 2 kilomètres de long. Sur sa partie Est, elle se termine par un long band de sable qui ne demande qu’à accueillir une tente.
Maltatayoc - Coron
Distance : 72 km
Le lendemain on prend le temps d’explorer le lagon en face de notre tente. L’eau est très claire et les fonds très riches. Une fois de plus, la variété des coraux et des poissons qui y habitent est étonnante. On passera une bonne demi-journée sur ce petit bout de paradis, occupés entre farniente et baignades.
L’un d’eux nous voit arriver et s’avance vers nous… Il attendra qu’on arrive sur la plage pour nous expliquer poliment qu’il est navré mais qu’ils ne peuvent pas accepter de visiteurs. Après lui avoir expliqué qu’on manquait d’eau, il s’empresse d’aller nous remplir un bidon dans lequel il rajoute de la glace pilée et nous souhaite bonne chance pour la suite du périple.
Beaucoup plus sympa.
On lève ensuite l’ancre en direction des îles Cay, quelque centaine de mètres au Nord. La première, South Cay est est une île privée rachetée par un complexe hôtelier. Non contents de notre première expérience avec les milliardaires et îles privées, on s’approche prudemment de l’île pour demander de l’eau. Au milieu de la petite île, 4 personnes sont à table, avec près d’une dizaine de serveurs et cuisiniers qui s’affairent autour.
On file encore plus au Nord, histoire de visiter la dernière île de cette enfilade : l’île de North Cay. Après avoir fait rapidement une visite des lieux et un petit plouf dans ses eaux turquoise, on se prépare pour la grande traversée qui nous permettra de rejoindre l’île de Busuanga.
Le vent a légèrement changé de sens, et ce n’est pas pour nous aider. On traverse la zone d’élevage de perle et c’est parti pour plusieurs kilomètres de rame. Parfois la fatigue a raison de nous. On s’autorise quelques minutes de pause mais pas bien plus car le vent nous fait reculer dès qu’on arrête de paguailler…
On avait repéré une plage sur les cartes, et pour notre plus grand bonheur, une partie de la plage est déserte et remplie de cocotiers. Ça nous rappelle les bons souvenirs d’Ofu. On s’en décrochera une petite dizaine, pour l’apéro du soir avec du rhum, le petit dej du lendemain et pour remplir une gourde pour la route.
Le lendemain matin, calme plat. Première fois depuis une semaine. Tant mieux, ça nous permettra de bien avancer vers l’Est. En milieu de journée, le vent se lève d’un coup, un grand coup… On finit très difficilement les quelques kilomètres qui nous séparent de l’île de Lusong. Le vent est violent, on a l’impression de remonter des rapides. Des pêcheurs sur leurs bateaux (motorisés) nous lâchent de grands sourires, mi curieux mi moqueurs. On passe pour des barjots.
Passés le petit verrou, on s’arrête pour se reposer sur une plage, casser la croûte et explorer l’un des récifs de corail les plus impressionnants que l’on ait pu voir jusque-là. On trouvera un endroit pour poser la tente, un peu plus loin, au Sud de l’île, juste en face d’une épave dont la proue effleure la surface de l’eau. On se réserve son exploration pour le lendemain matin.
La tente montée et les affaires bien installées, on se rend compte que contrairement à ce qu’on pensait, la marée est encore montante. Comme à notre habitude, on s’est encore plantés. Du coup on passera deux bonnes heures au milieu de la nuit à monter une digue à la pagaie, au fur et à mesure qu’elle se fait grignoter par les vagues.
Les affaires sont sèches, au prix d’une bataille acharnée jusqu’à 23h…
Le lendemain on est aux premières loges pour aller explorer l’épave à une centaine de mètres de la tente. A marée basse, le haut de la carcasse est à peine quelques centimètres sous l’eau. C’est parfait pour nos petits poumons. Une quantité impressionnante de coraux ont colonisé l’épave, autrefois utilisée pour transporter des cargaisons d’armes, aujourd’hui refuge de centaines de poissons bariolés.
Au cours de l’exploration on croisera une tortue, peu farouche, elle se laisse approcher de très près, comptant sur le fait que si les choses se gâtent quelques coups de nageoires lui suffiront pour nous semer. Clou du spectacle, à peine remontés sur le Kayak, deux raies bondissent hors de l’eau entre un et deux mètres de hauteur. On se croirait devant un docu BBC…
On repart en direction de Sangat Island, plein Est, le vent dans les dents mais des étoiles plein les yeux.
Deuxième arrêt de l’île un peu plus au Sud, il y aurait une grotte quelque part dans les parages. Une fois le Kayak attaché on attaque dans les falaises de calcaire. On tombera sur la grotte presque par hasard. Une corde à nœuds permet de descendre dans une cheminée et après la traversée de quelques salles via un petit pont de bambou rudimentaire, on se retrouve de l’autre côté dans la jungle. Un petit sentier semble continuer plus loin, mais la chaleur étouffante et une armée de moustiques affamés auront rapidement raison de nous.
Une fois arrivés au pied des falaises, on s’enfonce dans un passage au travers d’une mangrove qui mène à une petite source d’eau chaude. L’endroit est joliment aménagé et forme un lieu calme et reposant. L’eau y est très chaude mais en alternant avec un bain dans l’océan, on y trouve son compte.
Demi-tour par la grotte, puis on enchaîne avec une exploration rafraîchissante des fonds tapissés de corail. On en profite également pour pêcher, avec quelques mollusques qu’on fixe au bout de l’hameçon. Finalement après plusieurs essais, on aura eu le droit qu’à admirer le talent des poissons à se tirer avec l’appât. A l’évidence, on est les pires pécheurs de la planète.
On vise une petite plage au Sud-Est de l’île, il faudra encore affronter quelques sévères bourrasques de face pour arriver au pied de grandes falaises calcaire, légèrement à l’abri du vent.
Le lendemain une grosse étape nous attend. Tôt le matin le vent est déjà là. On cherche à s’abriter un peu, quitte à rajouter des kilomètres, en contournant l’île d’Apo par le Nord, ce qui nous offrira une belle traversée de mangrove, au calme. Une fois de l’autre côté de l’île, en sortie de la mangrove, c’est une autre histoire. Il faut garder une bonne cadence si on ne veut pas reculer. La castagne atteint son apogée lorsqu’on traverse un petit bras de mer entre deux montagnes, face à un courant d’air assez phénoménal.
Pendant un bon moment on donne tout. On ne parle pas, on baisse la tête et on galère fort. Les bras en feu, on force comme des brutes pour avancer à un petit kilomètre-heure face à un jetstream impitoyable. On finit les 200 mètres de corridor infernal et on va s’abriter derrière une petite île. On profite comme jamais des quelques mètres de calme plat. Ça fait un bien fou.
On a sûrement passé le plus pénible, mais il reste encore quelques kilomètres relativement exposés pour rejoindre la petite île de CYC (Coron Youth Club), un petit paradis tropical de 50×20 mètres qui dépasse d’un récif à peine plus grand. L’île est assez proche de Coron, c’est certainement un endroit où il paraît improbable de se trouver seul. On est samedi, deux ou trois familles ont transformé la petite plage en terrain de jeux pour la quinzaine d’enfants qui les accompagnent.
L’ambiance est joyeuse. Ils viennent de l’île voisine, visiblement ils sont tous arrivés sur 4 bateaux à peine plus grands que notre kayak, ça ressemble beaucoup à une sortie à la journée. En tapant la causette avec ceux qui parlent anglais, on apprend que ça fait partie d’un petit rituel : réunir quelques familles pour venir camper sur l’île, à la belle. On ne sera donc pas seuls sur ce petit bout de plage paradisiaque. Au moins ce sera vivant.
Pour être vivant c’est vivant : vers 2 heures du matin, tout le monde se réveille, discute, rigole et les enfants se lancent dans une chasse au crabe. Finalement ils décident de lever le camp et de repartir en bateau, au milieu de la nuit, à la frontale. Le lendemain matin, calme absolu. On aura le droit à notre petit moment à nous, seuls sur l’île avant l’arrivée des premiers bateaux.
Après en avoir bavé sur quelques mètres, on passe derrière la pointe et là c’est enfin plus calme. On longe tranquillement la côte Nord-ouest. Passant non loin de l’hôtel flottant, on y fait une petite pause. Le propriétaire Paolo, marin-voyageur, nous offre le café et nous propose une douche. A ce qu’il paraît entre marin on s’entraide. On se sent usurpateurs, mais flattés. Après une petite visite de sa structure en complète autarcie, on reprend la route. On passera une dernière nuit sur la même plage que la première, Vivian Beach.
Le vent n’a pas faibli. Depuis CYC on a deux possibilités pour rejoindre Coron. Longer l’île de Uson pour rentrer au plus court avec le vent de face, ou rallonger pour rejoindre l’île de Coron et s’abriter de ses falaises. On décide de se lancer dans la plus longue. Le vent nous force à accoster sur la plage de Banol pour reprendre des forces. Tous les petits bateaux de touristes font de même. Ça souffle sévère. On repart sous le regard curieux des guides… on passe encore pour des fous.
Le lendemain il faut se rendre à l’évidence, on va devoir rentrer. Du coup on se dirige doucement vers le village de Coron. Il y a toujours ce même vent d’Est qui nous a accompagné depuis le début, mais grâce la petite boucle jusqu’à la pointe Nord-Est de l’île d’en face, on l’a enfin dans le dos. On se fait pousser tranquillement vers le port du « New Market », retrouvant notre loueuse plutôt rassurée de nous voir rentrer vivants avec son kayak intact.
S’il vous reste quelques jours à tuer sur l’île de Busuanga, il y a de quoi faire. Le (gros) village de Coron n’est pas franchement intéressant. Tout le village est articulé autour d’une rue où règne un chaos de tricycles (petite moto avec cabine latérale montée sur trois roues ; capacité max touristes : 3 personnes / locaux 7 personnes + chargement bien tassé). Les hôtels se construisent de partout et commencent à monter en hauteur, se disputant les vues sur la baie. Le marché est le seul endroit où il reste une vie locale, le reste du village est dédié à l’accueil, la restauration et les loisirs des touristes. Le mont Tapyas, accessible depuis le centre-ville mais du coup très prisé vous permettra d’admirer le coucher de soleil.
Les possibilités de s’échapper de Coron ne manquent pourtant pas, et c’est une bonne occasion pour explorer les fonds marins et les épaves autour de l’île, il y en a une dizaine. On a eu l’occasion de s’initier à la plongée sous-marine en passant le premier niveau du PADI en trois jours. Sans faire de pub, on est passé par Reggea Dive Center et notre moniteur Dino était pro et relax. Tout ce qu’il fallait pour rendre l’expérience inoubliable. La sensation d’échapper à la pesanteur et de s’inviter à cette vie sous-marine inaccessible autrement est indescriptible. (Merci les copains pour le cadeau)
Mt Tundalara
Distance : 9.4 km
Dénivelé : 750 m
Au rayon bivouac, les environs directs de Coron n’offrent pas vraiment d’endroit au calme, mais au prix d’une demi-heure de tricycle et 500 mètres de montée on accède à un petit plateau quelques centaines de mètres sous le sommet de l’île : le Mont Tundalara. L’itinéraire classique se fait en aller-retour sur une sente bien marquée au Nord-Ouest du sommet, mais en cherchant un peu c’est également faisable en traversée -gps obligatoire- en montant par des petites sentes plus ou moins abandonnées par le versant Sud-Est.
A cause d’un départ tardif on sortira de la forêt peu avant que le soleil ne bascule de l’autre côté et on finira à la frontale. On posera la tente sur un petit replat juste en dessous du sommet. Si on n’avait pas été aussi tardif, le coucher de soleil d’ici aurait été spectaculaire.
L’ensemble est accroché à deux traverses de bambou sur lesquelles 4 bonhommes se répartissent de chaque côté. L’équipe est en tong, bien sûr. On ne les a pas vu à l’œuvre mais on imagine ça impressionnant. Retour en tricycle sur les pistes creusées de nids de poules, à 6 sur 3 roues.
Le lendemain on fera une petite boucle au sommet, malheureusement sabordé par une antenne relais avec générateurs, fuites d’huiles, odeurs de fuel et tout ce qui va avec. Après avoir récupéré les sacs on retrouve le chemin de descente. Plus facile, avec plus de d’ouvertures qu’à la montée, mais ça reste escarpé par endroits. Sur la descente, une équipe d’une dizaine de Philippins prennent une pause à côté d’une bobine de câble insoulevable.
Ocam ocam & Malajon
L’île Malajon (Black Island) est une petite île un peu plus grande que les autres satellites de Busuanga. Pour vous rendre sur l’île, vous pouvez prendre un bateau depuis Salvation ou Ocam Ocam. La deuxième option est la meilleure, car la plage/village de Ocam Ocam vaut en soit le détour. On a pris le bateau depuis Salvation. Arrivés en ville trop tard pour un départ le soir même, on passe la nuit sur son bateau. Il nous installe au milieu de la baie pour être tranquille, jette l’ancre et repart. On se met à l’aise dans les 3 m² disponibles et on passera la nuit à se faire bercer par les vagues.
Il est tout à fait possible de passer la nuit sur l’île, en tente ou sur une table sous un toit de paille, contre 2 à 3 euros par tête. Ici aussi, il y a des épaves. La première est ensevelie dans la plage, mais on devine le haut de la structure dépasser à marée basse. La deuxième gît à plus de 20 mètres de fond, elle est reliée à la surface par une corde nouée à une bouée et sur laquelle on peut tirer pour se rapprocher de l’épave.
Le lendemain on lève l’encre avec les premières lueurs. L’île est impressionnante. Toute en longueur, elle est occupée par une grande falaise dans laquelle est venue se nicher une grande plage de sable fin. A notre connaissance il n’y a pas moyen d’aller se trincher au sommet. En revanche il y a une jolie grotte dans laquelle on peut se baigner dans une eau fraîche, légèrement salée. La plage est l’une des plus belles du coin, le récif un des plus riches et l’eau parmi les plus claires de l’archipel, on y resterait des jours.
De retour sur l’île de Busuanga, direction la plage d’Ocam Ocam. Il est possible de passer la nuit en petite cabane de Bambou avec un certain confort, et en discutant avec les locaux vous trouverez sans problème où poser une tente. Une centaine de personnes vivent sur la plage qui a sa propre école, en fête le jour de notre arrivée. Pour le dernier jour avant les grandes vacances de Noël, toutes les classes donnaient un petit spectacle auquel nous avons été (nous nous sommes ?) invités. Les enfants sont sur leur 31, tous excités à l’idée de passer sur scène. L’ambiance est festive et bon enfant.
7 Comments
Vous êtes complètement fous!!!! Mais vous venez de me faire passer un moment magique! Je ne regrette pas d’avoir guetté si longtemps votre dernier message.
Absolument fabuleux!
Mais quand même, les guides ne sont pas les seuls à vous trouver… »surprenants »!
Magnifiques photos et passionnant commentaire.
Je vous embrasse fort .
Inutile que je vous dise de prendre soin de vous….je ne peux au mieux que vous souhaiter des vents qui vous poussent…dans une bonne direction!
Merci tribouline 😉
Pour les vents, ils nous ont bien poussé effectivement !
Ah bah je l’avais zappé celui là…
Magnifique, belle petite ballade en kayak. On se croirait presque au lac de Miribel tellement c’est beau !
Bisous les cocos et à bientôt !
Non, faut pas exagérer, ça ne vaut quand même pas le lac de Miribel, mais on fait avec ce qu’on a … 🙂
Bravo à vous c’est vraiment merveilleux.
Pourriez vous me donner des détails concernant les distances maximales de traversée que vous avez faites pour aller d’île en île ?
Si certaines étapes étaient à changer/améliorer ( en terme de traversée, de difficulté, de dangerosité) lesquelles seraient elles ?
Les passages venteux étaient ils sur des périodes longues avec risque important de dériver ?
Nous comptons en effet faire un itinéraire dans La zone mais avec des packraft, beaucoup plus compliqué malheureusement sur les traversées avec du. Ouvrant et du vent d’où l’intérêt de limiter au maximum ces distances.
Merci pour tout
Votre chaîne est vraiment géniale
Salut Vincent, merci pour ton mot.
Si tu veux tenter l’aventure : Gogogo c’est génial ! La traversée la plus ‘engagée’ est celle du sud, entre Coron et Bulalacao. Un peu moins de 10km mais exposé à la houle qui arrive du sud-est. Le vent dominant vient du sud-est aussi, ce qui pourrait faire dériver mais vers l’intérieur de l’archipel. Vérifie bien le jour de la traversée que tu ne pars pas avec un vent du nord qui pourrait te pousser au large.
Attention avec les packraft, vous serez plus légers et plus ‘volatiles’ qu’en canoé si jamais ça pousse fort. Faites aussi gaffe aux coraucx, prévoyez bien vos heures de traversée des lagons et lagunes en fonction de la marée… A votre place je pense qu’on louerait un gros deux places en plastoc, mais ce n’est que notre avis 🙂
En clair, si c’était à refaire on ne changerait pas le tracé, mais attention à cette traversée donc. Si t’as d’autres questions n’hésite pas. Tu veux faire la traversée quand ?
[…] pas grand-chose à voir avec l’espèce de planche de plastique à fond plat qu’on avait pour notre précédente sortie de Kayak de mer aux Philippines. Sur ces engins de compet’ (a priori le minimum syndical pour sortir en mer), deux trappes nous […]